25.02.2016-16.04.2016

Galerie Sonia Zannettacci
Art contemporain

Kosta ALEX
de-ci de-là, oeuvres de 1970 à 1991

Au début des années 70, Alex éprouva le sentiment que le monde perdait de son épaisseur, qu’il devenait de plus en plus plat. Tout, autour de lui, rétrécissait, son atelier compris…! Devant ce brutal manque de place, il décida d’abandonner la sculpture en ronde-bosse pour des découpages en léger relief.  « Alors j’ai tout aplati », répétait-il volontiers en taillant à l’aide de son scalpel de nouvelles figures dans des panneaux de carton ondulé … Principale responsable de ce chambardement : la bagnole, nouveau symbole de la puissance mâle et idole de tout foyer, venue soudainement engorger les rues. A l’étroit dans ces petites prisons que sont les bolides, pilotes et passagers se tenaient désormais côte à côte, en ligne… De leur morphologie particulière, ils ne laissaient plus guère voir que leur profil à travers les  portières, derrière les hublots. Le charme des face-à-face semblait rompu.

Pourtant Alex n’est pas un esprit à demeurer longtemps chagrin. Que la voiture étouffe les centres-villes, c’est possible, et regrettable, mais elle est aussi un merveilleux moyen de s’évader du chahut et de gagner rapidement le large. Grâce à son puissant moteur et à ses quatre roues, on échappera à la routine, on battra la campagne. Il suffira même d’étaler une carte routière sur le sol pour qu’une partie du voyage soit déjà accompli… Car aussitôt la tête se remplit de rêves, elle imagine de vastes horizons, dessine montagnes, lacs, forêts et champs couverts de fleurs. C’est là la revanche de l’automobile ! Vite, on se rendra de Paris à Pontoise ; en quelques heures on ira de Genève à Saint-Gall ; bientôt on emmènera la jolie fille d’Arles faire un tour et Patricia, enfin, acceptera de vous accompagner jusqu’au bord de la mer. Et mardi, si on le désire, on atteindra Athènes… Transporté assis, tout voyageur ne peut qu’apprécier : ses yeux en roulant s’agrandissent. Baladés, émus de tout, ils semblent dévorer le paysage. C’est ainsi que, doué d’une fantaisie souveraine et enjouée, refusant la menace qui confinait son art, enfin grâce à une habileté de la main qui lui permet de faire feu de tout bois, Alex s’est affranchi d’un esclavage pour nous emmener sur les routes où chacun recompose librement son voyage…

Florian Rodari. février 2016